Résumé :
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La conduite Hikikomori qualifie un retrait au domicile primaire. Elle survient chez des sujets dont le tableau clinique témoigne de souffrances narcissico-identitaires organisées autour de clivages précoces. Les processus intellectuels et affectifs fonctionnent indépendamment, ce dont l’expression langagière témoigne. Les mots n’appellent pas d’images, ils se diluent dans d’abstraites généralités ou dans des énoncés factuels, sans que l’émotion les colore. Ces sujets instaurent une coupure avec le monde réel extérieur, comme pour retrouver un intérieur qui leur soit propre, à la frontière définitivement établie, en dur. Ils tentent une forme d’affirmation subjective en rejetant le dehors, mais le font en silence, pacifiquement, sans haine perceptible. Comment venir en aide à ces singuliers patients qui généralement ne formulent ni désir ni demande ? La première tâche du thérapeute est de parvenir à les rencontrer, parfois initialement au domicile. Lorsqu’un cadre de psychothérapie peut se mettre en place, ajusté au plus près des contraintes et résistances du patient, il va s’agir d’entreprendre un laborieux travail de reliaison entre les mots et les affects qui risque d’exposer à l’expression d’une violence verbale débridée, utilisant volontiers comme support les phénomènes culturels. L’actualité du monde s’offre comme médiation et canalise cette émergence pulsionnelle brute. Cette matière, culturelle au sens large, prend une place déterminante dans l’économie psychique des hikikomoris. Elle tient lieu d’extériorité et s’y déchargent les tensions au travers des mots, au fur et à mesure que ceux-ci sont pulsionnellement réinvestis. La visée du processus thérapeutique est d’accompagner la transformation de cette violence en une agressivité adressée, subjectivante, amorce d’une liaison libidinale s’opposant aux effets du clivage intrapsychique. [résumé d'auteur]
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