Résumé :
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Le syndrome de Munchausen par procuration est défini par la production de troubles factices sur un individu par un proche, engendrant un nomadisme médical et des prises en charges somatiques plus ou moins invasives. Les cas rapportés de victimes s’étendent de la période périnatale à l’âge adulte. L’existence de cas chez l’adolescent soulève la question de la participation, consciente ou inconsciente, de la victime au syndrome de Munchausen par procuration. L’objectif de cette étude est d’étudier le type de participation adolescente à ce syndrome. Nous avons colligé une série de 8 cas hospitalisés dans le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de la Pitié Salpétrière durant la période de 1994 à 2022. Ces patients ont été hospitalisés dans un contexte d’expression clinique complexe pour lequel le diagnostic de syndrome de Munchausen par procuration a été discuté. Nous avons étudié les différents aspects psychopathologiques de ces 8 cas à partir des dossiers médicaux (comptes-rendus d’hospitalisation, entretiens de patients, bilans psychologiques et psychomoteurs). Nous avons décrit 8 cas d’enfants hospitalisés, entre 9 et 17 ans. Les symptômes fonctionnels étaient d’ordre psychiatriques et parfois somatiques. Les bénéfices secondaires étaient pour la plupart d’obtenir l’attention parentale, avec une amélioration constatée chez tous les patients lors de la séparation avec le proche. Nous avons étudié la participation du patient dans les différents cas décrits, et le degré de conscience de sa participation. Ces différentes observations cliniques permettent de soulever une dimension systémique avec un système composé de l’auteur, du patient 'victime' et du médecin suggérant une participation de chacun des membres au système. Les arguments psychopathologiques retrouvés sont l’amélioration à la séparation avec le proche, des dysfonctionnements systémiques, une organisation familiale autour de la relation à deux, la plupart du temps entre l’enfant et sa mère sans tiers et plus particulièrement sans figure paternelle, favorisant une interaction dyadique mère-enfant exclusive. L’ensemble des bénéfices secondaires à la production des troubles ont majoritairement pour fonction d’entretenir une relation 'fusionnelle' avec le parent articulée autour de symptômes somatiques ou psychiatriques. Dans ces cas complexes, nous questionnons la participation de l’enfant ou de l’adolescent, cherchant à répondre aux attentes de son parent qui le voit comme un malade chronique, dans cette pathologie initialement induite par un membre de la famille. Devant les arguments systémiques retrouvés dans les observations, nous proposons le terme de syndrome de Munchausen 'partagé' plutôt que 'par procuration' dans les cas avec participation active ou passive et partiellement consciente de l’adolescent au subterfuge. Cette série nous a donc conduits à privilégier une approche systémique en particulier chez les adolescents les plus âgés et à introduire le concept de syndrome de Munchausen partagé. Nous retrouvons des cas de syndrome de Munchausen par procuration notamment chez les patients les plus jeunes, des cas de Munchausen partagé, et des cas des patients s’auto-infligeant les lésions avec une participation consciente et active au tableau de Munchausen, il s’agit alors de patients plus âgés, faisant évoquer une évolution vers un Munchausen 'classique'. Nous pouvons émettre l’hypothèse que les différents syndromes de Munchausen 'par procuration', 'partagé' ou 'classique' se présentent comme un continuum en fonction de l’âge et de la maturité psychique. [résumé d'auteur]
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